lundi 6 février 2012

L'echec des Utopies

III.

A. L'Echec des Utopies


Dans les utopies précédemment étudiées, certaines d'entre elles n'ont pu subsister avec le temps pour diverses raisons, tandis que d'autres semblent continuer à fonctionner, plus ou moins en accord avec leurs principes de départs. Aujourd'hui de ces utopies disparues, il ne reste pratiquement rien, sinon le souvenir d'une gloire passée, mais peut-on réellement parler d'échec pour ses utopies ayant franchis le pas de la concrétisation ? A l'inverse, peut-on considérer qu'une utopie fonctionnelle soit forcément une véritable réussite ?


Certaines des utopies étudiées ne parvinrent pas à subsister jusqu'à aujourd'hui. C'est le cas notamment de la communauté d'Icarie, dont la réalisation ne dura pas même dix ans. Fondée officiellement en 1847, elle fut dissoute en 1856 à la suite de la séparation des icariens. La communauté semble pourtant prospérer, jusqu'en 1856, mais lors des nouvelles élections, où les idées fondatrices de Cabet sont jugées trop liberticides, et il est lui même considéré comme un tyran. La communauté se sépare alors en deux, les opposants d'Etienne Cabet, désireux d'élire un nouveau chef et ceux qui le soutiennent.  Après cet événement catastrophique, la société se sépare totalement et se forment plusieurs groupes, tous se revendiquant icariens, et tentant par de nouveaux principes moins stricts de reformer une communauté a l'image de leur propre utopie. Quelque unes semblent subsister, jusqu'à la mort d'Etienne Cabet, le 9 novembre 1856, où toutes les utopies s'écroulent. Les derniers icariens soutenant les idéologies de Cabet vont alors demander la dissolution officielle d'Icarie à la cour de Carthage ( Illinois), marquant la fin de ce rêve utopiste qu'était Icarie. Cabet avait été battu, Icarie avait vécu. En effet, les principes communistes et égalitaires qui formaient la base de la communauté icarienne se révèlent bien trop stricts pour la plupart des icariens, et la prospérité alors présente dans le roman Voyage en Icarie, ne pouvait être complète, que lorsque que la cité serait entièrement battis et organisée. Etienne Cabet, n'en tenant pas compte, voulu appliquer ses principes dès le commencement de son utopie, obligeant les nouveaux icariens à se plier à des règles nouvelles qu'ils ne purent respecter devant la situation délicate et difficile de la construction de la communauté. Cette fin précoce, fut donc causé par les désirs et le projet d'Etienne Cabet, qui voulu appliquer le même concept que la cité de fiction de Voyage en Icarie, à une cité à peine construite et expérimentale, sans tenir compte des contraintes de la réalité, dont le désir de particularisme des icariens, et leur nature imparfaite ne pouvait effacer les sentiments tel que la jalousie ou l'égoïsme, principes totalement abolis au coeur de l'icarie de fiction. Aujourd'hui, de cette ancienne communauté icarienne, il ne reste que de vagues souvenirs des différentes communautés utopiques, se revendiquant d'Icarie, qui disparurent toutes à l'aube du XXème siècle. Les terres occupés par les icariens ont aujourd'hui été remplacé par des villes ou autre terrains privés. Il ne reste, de cette utopie, que l'ouvrage fondateur, Voyage en Icarie, les récits de ces icariens volontaires qu'ils firent à leurs familles restés en France, et les souvenirs d'une utopie chimérique. 
  C'est également le cas du Familistère de Guise, pour des raisons différentes cependant. En effet, celui-ci subsista bien plus longtemps que la communauté d'Icarie, peut être puisqu'il ne se fondait pas sur une oeuvre de fiction mais bel et bien sur la théorie d'un humaniste. Ce Familistère et son usine fonctionnèrent pendant presque cent ans, jusqu'à ce que les réformes de 1968 modifient le fonctionnement de cette communauté utopique et la conduisent à sa perte. L'esprit coopératif entre les ouvriers, déjà fragilisé par le temps, se dissout totalement lorsque l'usine tombe dans la sphère capitaliste, creusent un trop grand fossé entre les différents classes d'ouvriers y travaillant et y vivant. Ces réformes sociales obligent la fermeture du complexe du familistère, et l'usine est racheté par le groupe industriel "Le Creuset". Les différentes habitations sont peu à peu vendu à la collectivité locale et l'utopie du Familistère s'effondre. Ne subsiste de cette formidable utopie ouvrière que le site. Quelque bâtiments du complexe du Familistère de Guise ont été classés monuments historiques en 1991 et peuvent aujourd'hui être visités, ainsi que la marque de poêle Godin que quelque salariés continuent de faire vivre. l'usine continue aujourd'hui de fonctionner, mais elle a été reprise depuis, par une autre entreprise industrielle. La fin du Familistère de Guise fut causé par ces réformes de 1968 qui réorganisèrent totalement le monde du travail industriel, mais cette perte se faisait déjà pressentir: en effet, depuis sa création, le Familistère de Guise, considéré comme utopie à part entière, était sensé regrouper le rêve du bonheur ouvrier; une fois mis en place, plus personne n'aspirait à un autre idéale. Mais en un siècle, les temps et les moeurs changent, mais le Familistère de Guise, lui, ne connut aucune évolution sur sa manière de fonctionner ni sur ses habitudes, ce qui, à l'heure des reformes sociales, aboutis à bouleversé l'équilibre, déjà fragile, que cette communauté utopique avait réussis à conserver malgré le temps.
  Les deux autres communautés utopiques étudiées, quant à elles, subsistent encore de nos jours, mais furent créer plus tard, ce qui explique peut être leur continuité. Auroville continue de fonctionner, depuis sa création en 1968, mais cependant n'a pas atteint la proportion qu'elle voulait atteindre au départ. En effet, ses membres se compte à ce jour à quelque 2000 personnes, alors qu'au départ, elle était sensé accueillir environ 50 000 aurovilliens. De plus, cette communauté, à la base, utopique, est  affranchis du concept de séparation de toute société extérieure par certains aspects ; en effet, Auroville entretient d'étroits liens avec la société indienne, ainsi que l'exportation des produits conçus à Auroville. Et même si son aspiration est la recherche de soit dans une toute autre conception du monde, affranchie des anciens modèles qui circulent dans la société, l'Etat indien finance encore certaines parties de cette communauté qui ne peut fonctionner sans son aide financière. De plus, de nombreux principes, décidés au départ ne purent être respecter, notamment le principe de l'éducation. Auroville n'était pas sencé avoir une véritable école, mais permettre aux enfants de s'épanouirent et d'apprendre dans la communauté tout au long de leur vie. Cependant, après quelques années, certains enfants nées dans la communauté voulurent intégrés des écoles en dehors d'Auroville, et la création d'une véritable école, sur le modèle actuel, fut décidé, pour former ces jeunes enfants au modèle de la société extérieur et leur permettre d'avoir la possibilité d'évoluer dans un cadre encore inconnu et bien différent de cette communauté d'échange et d'harmonie perpétuelle. De plus, la communauté d'Auroville, attire, malgré elle, un grand nombre de touristes, plus désireux de visiter et découvrir le mode de fonctionnement et de vie de la communauté sans participer au développement de celle-ci, plutôt que la recherche de son être intérieur, et de l'existence humaine. Si bien que des habitations prévus à leurs effets furent crées puisque toute personne désireuse d'intégrée ou de visiter la cité d'Auroville est autorisée. Cet afflux de touristes obligea d'ailleurs le gouvernement d'Auroville a revoir le statut des nouveaux habitants. A l'origine, toute personne désirant rejoindre la communauté était accepter, peu importe sa religion, son origine, son mode de vie ou ses richesses, mais désormais le statut d'aurovillien réel n'est accordés qu'à partir d'un certain temps d'acclimatation dans la cité. Ces changements et ces compromis ont sûrement permis à Auroville de s'adapter à la société actuelle et ainsi donc, à continuer d'exister, contrairement à la communauté icarienne par exemple, qui elle, n'a tenue aucun compte de la réalité environnante. et qui causa sa perte.
  L'utopie de Rainbow Family, créer quant à elle, dans les années 1960, n'a pas la proportion ni l'importance d'Auroville, mais cela ne l'empêche pas de fonctionner et, son échelle réduite à peut être même contribuer à sa continuité. La Rainbow Family est composée de plusieurs petit groupes répartis sur l'ensemble de la planète (Etat-Unis, Suisse, Canada...) qui ne se réunissent qu'à l'occasion des "Rainbow Gatherings". En effet, depuis sa création, la communauté semble fonctionner sur les principes simples énoncés dés l'origine, et continue, bien des années après, à fonctionner sur le même modèle. La Rainbow Family, dispersé en petit groupe totalement auto-géré, n'entretient aucun lien avec la société et cela lui permet donc de se tenir éloignée des problèmes qu'elle pourrait engendré et ne l'oblige en rien, à accommoder ses principes. Ainsi, ses membres vivent depuis toujours en harmonie complète avec la nature et ne font usage de l'argent et des produits de notre société qu'en cas des grands rassemblement des "Rainbow Gatherings", et qui cette fois, rejoint Auroville, ne serait-ce que dans sa proportion et son mode de fonctionnement. Cependant, ses échanges sont très limités et organisés pour éviter toute influence du monde sur l'organisation de la communauté, qui semble très bien fonctionner, sur les mêmes idéologies de partage et d'échange depuis le commencement


Mais alors, peut-on réellement parler "d'échec" dans le cas de ces communautés ? Malgré le fait que certaines d'entre elles, comme Icarie ou le Familistère de Guise, est vu leur aboutissement, le simple fait d'avoir exister, d'être passé du simple rêve utopique, à une réalité concrète et fonctionnelle pendant un certain nombre d'années, leur procure une certaines réussite. Nombre d'utopie ne sont restés chimères que par manque de moyens, d'adeptes ou simplement de conviction, rare sont les rêves devenus réalité, sans tendre vers la dystopie. Ces utopies donc, ne peuvent véritablement être considérée comme un total échec, bien que la réalité les aient contraint à l'échec ou à leur disparition. 
A l'inverse, peut parler d'une réussite, lorsque la communauté perdure mais s'est éloignée des principes qu'elle s'était fixée à sa création? C'est le cas d'Auroville, qui, malgré son existence qui semble vouloir perdurer, à été forcé à faire des compromis pour que la cité continue de fonctionner et reste en harmonie avec le monde alentour. Cette communauté, centrée alors sur la méditation et une toute autre perception de la vie pour tout ceux qui désireraient s'épanouir, devient peu à peu un lieu attractif pour toute personne curieuse de découvrir son fonctionnement et parfois ses failles. Prévus à très grande échelle, elle ne regroupe cependant qu'une grande minorité que ce qui était prévu au départ, et dépend plus ou moins de l'Etat indien, qui la soutient et la protège sur son sol. Seule Rainbow Family semble fonctionner comme à son premier jour, sur la même idéologie et la même harmonie initiale. Peut être justement, par sa petite envergure ou encore parce qu'elle à d'ors et déjà coupé tout lien avec notre société, jusqu'à l'abolition de la monnaie fiduciaire. Depuis des années, cette communauté formée de plusieurs petits groupes, vie et se développe en parfait harmonie, accueillant, à bras ouverts, tout nouvel adepte sans que cela ne pose aucun problème, et respectant les règles de vie fixée lors de sa création. Les seuls débordements possible restant durant les "Rainbow Gatherings", seul moment ou la Rainbow Family s'unis avec la société actuelle, et ils sont eux-mêmes extrêmement bien organisés, et n'oblige en rien la communauté à faire usage de compromis. On pourrait alors se demander si la réussite d'une utopie n'est pas de rester dans une petite envergure de sorte que tout liens avec la société soit coupés sans avoir recours à une aide quelconque de l'extérieur, ou si, au contraire, celle-ci doit s'étendre à toute la population, de sorte que tous adoptent l'idéologie prônée, sans pour autant sombrer dans un régime totalitaire. Seule quelques utopies concrètes semblent avoir réussis à faire la part des choses, et c'est cela qui les maintient encore en vie de nos jours, dans un équilibre maîtrisé entre le rêve et la réalité. 


BULLE

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